De Paname à Syd, à vélo, en lit à roulettes, à fond la caisse ou à pas lents, in French and English, sailing and steaming, even roller-bedding, stroll, rush and dérive pour un bout de chemin. Explosif!

29 May 2008

Salo ou les 120 journées de Sodome


Salo ou les 120 journées de Sodome, de Pier Paolo Pasolini, 1975.

Qui veut fabriquer des images ne peut ignorer ce film, adaptation visuelle de textes de Donatien de Sade, Pierre Klossowsky, Maurice Blanchot, Simone de Beauvoir, Roland Barthes et Philippe Sollers. Sa richesse visuelle n’a d’égale que la puissance de son propos.

Dans un château doublement insulaire, des notables de la république éphémère de Salo éduquent un groupe de jeunes gens dans un esprit totalitaire, en appliquant strictement des lois dont le seul objectif est leur bon plaisir.

« En vérité, la seule véritable anarchie, c’est le pouvoir. »

Toute l’action du film se déroule en huis clos, un huis clos démultiplié : la ville de Salo est entourée d’un rempart d’eau, représentant l’isolement politique de la république dans son contexte historique ; et dans la ville, le château de Salo est entouré d’une enceinte circulaire, concrétisant l’isolement des jeunes hors du monde extérieur. L’action du film s’organise en trois cercles thématiques, directement inspirés de la Divine Comédie, de Dante. À la logique implacablement réglée des structures spatiale et temporelle du film répond celle, non moins totale, de l’organisation sociale du groupe. L’espace paradisiaque donne lieu à une démarche infernale.

Strictement hiérarchique, cette organisation repose sur une structure unique, aussi symétrique et hermétique que l’architecture néo-classique des lieux. Le genre et l’âge sont les facteurs discriminants déterminant le rôle et la position de chacunE au sein du groupe. Les maîtres du château, « les notables », s’appellent « Duc », « Excellence », « Monseigneur », et « Président » ; l’ordre de Salo est une alliance de régimes moraux, militaires, sociaux et politiques, la noblesse, la bourgeoisie, l’église et la république. Il sont flanqués de quatre narratrices, chargées de stimuler leurs désirs par leurs récits, puis de veiller à leur satisfaction. Les objets et instruments de leur réalisation de ces désirs sont huit jeunes garçons et huit jeunes filles, les « victimes », choisiEs préalablement parmi les jeunes de la ville. Huit militaires assurent l’ordre pénal, et huit domestiques, presque invisibles, une intendance discrète.

L’unité du groupe est fondée sur la loi, écrite par les notables. La loi a pour but de systématiser l’éducation prodiguée aux jeunes au cours de leur séjour initiatique, régi dans ses moindres détails. Les lois de Salo s’appliquent également à tous, mais elles codifient les désirs des maîtres, en leur garantissant un double pouvoir : celui de disposer librement des corps des jeunes, celui de les punir s’ils transgressent l’ordre dont ils sont les objets, s’ils désobéissent aux maîtres dont ils sont les sujets. Les législateurs étant à la fois les bénéficiaires et les juges de la loi, celle-ci se confond de fait avec leurs désirs.

La population du château constitue une église (du grec ekklesia, « assemblée », d’ek « hors de » & kaleo, « j’appelle »), une assemblée unie par des valeurs exclusives, d’ordre religieux. Bien qu’anti-chrétien, le groupe récupère des rites chrétiens à ses propre fins. La plupart des activités, manger, chanter, écouter des histoire, se fait en commun, et est hautement ritualisée. Ainsi, le groupe assujettit l’individu à son pouvoir, et le dépouille de sa distance critique, par une pression coercitive continuelle. Seul le sommeil échappe à l’ordre. L’intimité et la solitude sont réprouvées, réprimées, ainsi que la sexualité libre. Ils constituent une menace pour l’unité du groupe, dont l’ordre symbolique repose sur le sacrifice de l’enfant. « à l’ombre des jeunes filles en fleur, elles ne vont pas croire leur malheur. Elles écoutent la radio, elles boivent du thé. Au degré zéro de la liberté, elles ne savent pas que la bourgeoisie n’a jamais hésité même à tuer ses fils ».

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2 Comments:

Blogger a_v said...

Pouvez-vous dire qui est l'auteur du poème récité par le Duc? "A l'ombre des jeunes filles en fleur" - c'est Proust, "Au degré zéro" - cela vient de Barthes, mais qui a composé le poème ? Pasolini lui-même ?

J'ai posé cette question sur mon blog, en l'ayant traduit en russe, mais pour l'instant c'est le silence : http://a-v.livejournal.com/208324.html

5:28 am

 
Blogger Dario said...

Je peu seulement penser qui soit l'ispiration de Pasolini qui ramasse ledms jeunes filles bourgeoises de Proust á la techno société contemporaine á Barthes aussi. Un petit mélange peut-être très bien aboutit

11:16 am

 

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